Les régimes militaires au pouvoir au Mali, au Burkina Faso, et au Niger ont officialisé, ce samedi, leur décision de créer un “espace sans visa” pour les ressortissants des États membres de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette annonce marque une nouvelle étape dans leur volonté de redéfinir les relations avec cette organisation régionale qu’ils s’apprêtent à quitter.
Libre circulation dans l’Alliance des États du Sahel (AES)
Le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a annoncé à la télévision publique que les ressortissants des pays de la CEDEAO pourraient désormais entrer, circuler, résider, s’établir et sortir librement sur le territoire des trois pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), formée par le Mali, le Burkina Faso, et le Niger.
Cette mesure s’accompagne de la possibilité pour les véhicules immatriculés dans l’un des États membres de la CEDEAO de circuler librement dans l’espace AES. Cependant, des restrictions demeurent pour certains immigrants qualifiés d’”inadmissibles”, sans précisions sur les critères retenus.
Une décision dans un contexte de rupture avec la CEDEAO
Cette initiative intervient alors que les trois pays ont annoncé leur intention de quitter la CEDEAO en janvier 2024, avec une effectivité prévue un an plus tard, en janvier 2025, conformément aux textes de l’organisation.
La CEDEAO, qui tiendra un sommet ce dimanche à Abuja, tente de trouver une solution pour éviter cette séparation. Elle avait notamment nommé le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye comme médiateur, lequel avait récemment rapporté des progrès dans les négociations.
Néanmoins, les trois États de l’AES maintiennent leur position de retrait, dénonçant une instrumentalisation de la CEDEAO par des puissances extérieures, notamment la France, et un manque de soutien face à la crise sécuritaire provoquée par les violences jihadistes.
Renforcement de l’intégration au sein de l’AES
Pour consolider leur union, les trois membres de l’AES ont adopté plusieurs mesures :
- Fin des frais d’itinérance téléphonique entre leurs pays.
- Harmonisation des documents de voyage et d’identité pour faciliter la libre circulation.
- Réflexion sur la sortie du franc CFA, leur monnaie actuelle, en vue d’une indépendance monétaire.
Enjeux et perspectives
L’espace AES regroupe une population de 72 millions d’habitants répartis sur un vaste territoire enclavé, confronté à de graves défis sécuritaires. En se retirant de la CEDEAO, les trois pays risquent de perdre des avantages économiques et diplomatiques, mais misent sur une intégration plus étroite au sein de leur confédération.
Ce rapprochement s’inscrit également dans leur stratégie géopolitique de distanciation vis-à-vis des puissances occidentales, en particulier la France, et d’ouverture vers des partenaires tels que la Russie.
Le sommet d’Abuja sera déterminant pour l’avenir des relations entre l’AES et la CEDEAO, mais l’absence probable des délégations des trois pays laisse peu d’espoir d’un compromis immédiat.