Dakar, 7 avril 2025 – L’affaire du détournement du bateau d’engrais prend un nouveau tournant judiciaire. L’homme d’affaires Aziz Ndiaye et son frère Massata Ndiaye ont comparu ce lundi devant le juge du deuxième cabinet, en charge de l’instruction de ce dossier sensible mêlant commerce transfrontalier, fraude présumée et figures bien connues du monde des affaires sénégalais.
Les deux frères ont été inculpés pour recel dans cette affaire retentissante, bien qu’ils contestent fermement les faits qui leur sont reprochés, selon les déclarations de leur avocat, rapportées par Libération. À l’issue de leur audition, Aziz Ndiaye a obtenu une liberté provisoire, tandis que son frère a été placé sous contrôle judiciaire.
Mais ce qui a surtout retenu l’attention, c’est le dispositif de caution mis en place par les deux hommes pour échapper à la détention. En effet, trois villas situées à Ngaparou, station balnéaire huppée de la Petite-Côte, ont été déposées comme garantie auprès du juge. Cette démarche aurait permis d’éviter un placement sous mandat de dépôt, selon des sources proches du dossier.
Une affaire à ramifications internationales
Au cœur de ce dossier se trouvent deux hommes considérés comme les principaux cerveaux de l’opération : L. Ngom et A. Sy, actuellement en fuite depuis 2021. D’après Libération, ils sont soupçonnés d’avoir orchestré la revente illicite d’une grande partie de la cargaison d’engrais à des acheteurs maliens. Des mandats d’arrêt internationaux ont été émis à leur encontre.
L’enquête vise à déterminer la chaîne de responsabilités dans la disparition d’une cargaison dont la valeur stratégique, notamment dans le secteur agricole, est considérable.
Entre justice et pouvoir économique
Cette affaire pose à nouveau la question du traitement judiciaire différencié selon les profils des accusés. Le recours à des biens immobiliers comme caution, dans un pays où de nombreux prévenus restent en détention faute de moyens, soulève des interrogations sur l’équité de l’accès à la liberté provisoire.
Aziz Ndiaye, figure de l’entrepreneuriat local, connu notamment pour son implication dans la télédistribution et le sponsoring sportif, voit ainsi son image écornée. Bien que présumé innocent, son implication dans une affaire de cette ampleur illustre les zones grises dans lesquelles évoluent certaines figures du capitalisme sénégalais.
Prochaines étapes
Le juge du deuxième cabinet devrait poursuivre les auditions dans les semaines à venir, avec l’objectif de faire la lumière sur le circuit exact de la cargaison détournée, les complicités éventuelles, et le rôle précis de chaque mis en cause. Le dossier reste ouvert, et les regards restent tournés vers les suites judiciaires d’une affaire où économie, justice et réseaux transnationaux s’entremêlent.